Noir, blanc, vert, de Kampot, Penja ou Voatsiperifery, parfois long ou à queue, boisé, fruité, floral ou encore herbacé… autant de subtilités qui décrivent aujourd’hui celui que l’on surnomme « Roi des épices » : le Poivre.
Qui n’en consomme pas ? Le poivre est devenu au fil du temps un ingrédient indispensable de nos recettes et expériences culinaires. Utilisé de manière classique ou sophistiquée, il apporte une touche particulière aux plats que nous préparons. Mais le roi n’en reste pas là…
Sous ses nombreuses formes et couleurs, chaque variété nous raconte une histoire et nous invite au voyage, depuis son origine et les pratiques qui lui sont rattachées, à sa dégustation et son utilisation dans de savoureuses recettes.
Eveillez votre curiosité et régalez-vous en partant à la découverte des poivres du monde et de leurs usages culinaires ! :)
Qu’est-ce qu’un Poivre ?
Avant de démarrer ce beau voyage à travers l’histoire et la gastronomie des poivres, savez-vous véritablement ce qu’est un poivre ?
Et bien c’est avant tout un fruit ! Et oui, qui l’eut cru n’est-ce pas ?
C’est le poivrier qui le produit, cette plante grimpante, sorte de liane du genre Piper et de la famille des Pipéracées très exactement. Plusieurs familles se disputent/partagent la couronne, mais celle des Pipéracées est la plus conquérante, la plus connue d’entre elles. On parle de « vrais » poivres. Les autres familles (Lauraceae, Rutaceae, etc) sont plutôt composées de baies (Baie du cannelier, Baie de Szechuan, etc).
Originaire des pays chauds, le poivre « naît » au sud-ouest de l’Inde actuelle. Adepte lui aussi des voyages, il est implanté à travers les siècles sur de nombreux terroirs de la ceinture tropicale (notamment grâce aux oiseaux).
La famille de plantes des pipéracées regroupe environ 2750 espèces à travers le monde, toujours en zone tropicale – Asie, Afrique, Amérique, Îles de Pacifique… Et c’est bien sûr le Poivre noir qui suscite le plus d’intérêt et se place au cœur de la tendance de nos jours.
Les couleurs du poivre – Piper Nigrum
Le genre Piper compte parmi ses 6 espèces, le Piper Nigrum, regroupant les poivres les plus connus (vert, noir, rouge et blanc). Les manipulations post-cueillette donneront au poivre sa couleur et ses saveurs finales.
Le poivre vert est d’une certaine manière, le plus immature. Lorsque la grappe est formée et les baies arrivées à leur taille adulte (mais pour autant par encore matures), le poivre « vert » est alors récolté. Il nécessite ensuite une conservation dans une atmosphère humide. Cette couleur de poivre est rarement commercialisée, étant plus généralement utilisée pour l’extraction des huiles essentielles destinées aux industries pharmaceutiques, cosmétiques et chimiques.
Le poivre noir, dont les baies sont cueillies avant maturité complète, doit sa couleur au séchage, qui lui donne également son aspect fripé. Cent kilos de poivre peuvent donner environ trente kilos de poivre noir.
Le poivre gris est tout simplement le résultat du poivre noir moulu.
Le poivre blanc possède la richesse aromatique la plus complexe, puisque composé uniquement du cœur du grain de poivre. Les baies sont récoltées à maturité optimale, et après un traitement complexe et minutieux destiné à les débarrasser de leur péricarpe (paroi du fruit enveloppant la graine), le cœur sèche au soleil pendant environ 3 jours, gagnant ainsi cette couleur très claire.
Le poivre rouge est peu commercialisé, car pour des raisons économiques, les baies sont généralement cueillies avant maturité ; Or, celle-ci doit justement sa couleur à la pleine maturité de sa baie sur la grappe. Le poivre rouge est souvent séché comme le poivre noir, avec cette étape supplémentaire de trempage dans l’eau chaude, favorisant la fixation de sa couleur.
La dégustation – technique et astuces
Les techniques de dégustation des poivres se rapprochent beaucoup de celles du vin. On parle Observation, Nez, Goût, pour décrire un profil aromatique et définir la force, la chaleur et l’intensité du poivre.
L’observation est basée sur l’attention portée à la couleur, la présence ou non du péricarpe, de striures… On peut ainsi en déduire des informations sur les pratiques culturales dont le poivre a fait l’objet, ainsi que sa maturité.
Nez fruité, floral, boisé… C’est bien l’analyse olfactive, étape la plus importante mais aussi la plus complexe, qui nous permet d’identifier les notes de tête, de cœur et de fond, à la manière d’un parfumeur.
Allons-y pas à pas :
– Les notes de tête = premier nez (avec baies entières) : Sentir l’épice dans la boîte afin de définir le caractère olfactif général.
– Les notes de cœur = second nez (après avoir moulu les grains) : Sentir de nouveau l’épice pour détecter les nuances aromatiques plus délicates.
– Les notes de fond = troisième nez (avec baies infusées) : l’eau portée à 70° permet d’amplifier les nuances aromatiques, et de sentir une dernière fois le poivre pour découvrir des notes encore plus complexes.
Le goût : c’est la dernière étape, l’examen gustatif qui révèlera les dernières subtilités du poivre.
On en distingue 3 temps : l’attaque (première impression en bouche) ; le milieu de bouche (en oxygénant le poivre en bouche, on juge de son épanouissement et de son mordant) ; la finale (dernière saveur qui reste en bouche, évaluation de sa persistance gustative et de sa longueur en bouche).
Focus Poivres du monde : Origine, Culture & Pratique
Cameroun – Le Poivre blanc de Penja : un grand cru de poivre
Son implantation au Cameroun, et plus particulièrement à Penja, s’est faite dans les années 30 par M. Decré, planteur de bananes. Les terres volcaniques naturellement riches et équilibrées et le climat équatorial de ce pays confèrent au poivre de Penja un caractère et une saveur exceptionnels.
Toutes les étapes de production (récolte, rouissage — immersion dans de l’eau de source pendant 8 à 10 jours — séchage, calibrage, tri) sont réalisées par les mains expertes des femmes du village.
Là-bas, on évoque la « pépite locale », qui a permis d’obtenir en 2014, l’Indication Géographique Protégée, une des premières du continent africain. Elle consacre une production existante, dont la qualité (ou d’autres caractéristiques, comme la réputation) est liée à son origine géographique, et lui confère une protection à l’échelle nationale et internationale.
Son registre aromatique : Animal, Herbacé
Arômes frais de menthol et de camphre, évoluant sur des notes délicatement sauvages et musquées. En bouche, il présente une saveur chaude et piquante, d’une grande longueur, et marquée par des arômes sucrés de viande caramélisée.
Utilisations salées : gibier, viande rouge, toast de sainte maure. Ou tout simplement avec des huîtres…
Utilisations sucrées : Tarte aux poires ; Fraises et jus de citron vert ; Ananas poêlé et glace vanille
Cambodge – Le poivre noir de Kampot : un des meilleurs et des plus répandus poivres du monde
Le poivre de la province de Kampot, au Cambodge, date du royaume d’Angkor, au XIIIème siècle. Ces terres exceptionnelles, situées en mer et montagnes, sont cultivées par des familles de planteurs amoureux de leur poivre et revendiquant leur savoir-faire ancestral, de récolte et de tri à la main.
Lui aussi bénéficie de l’IGP depuis 2009, mais également de l’AOP (Appellation d’Origine Protégée), qui limite les contrefaçons et favorise son exportation.
Son registre aromatique : Fruité Balsamique
Notes fruitées et mentholées, délivrant des senteurs de pomme et poire vertes. Saveur moyennement piquante.
Utilisations salées : Pintade farcie ou rôtie, viande rouge, gibier ou encore un filet de brochet poêlé…
Utilisations sucrées : Sorbet à la menthe fraîche, Poêlée de cerises confites à la chartreuse verte
Madagascar – Le poivre Voatsiperifery : le sauvage
Le Voatsiperifery est une liane, tenant son nom de « voa » qui veut dire fruit en malgache et « tsiperifery », plante. Il pousse à l’état spontané dans la forêt tropicale, dans les régions chaudes et humides, au sud-est de Madagascar. Sa cueillette est délicate et dangereuse, car la liane monte jusqu’à trente mètres de haut !
C’est un poivre très rare, dont le fruit n’est cueilli que de juin à août, entièrement à la main par des communautés villageoises.
Il faut en effet 10kg de baies fraîches pour 1kg de poivre séché. Sa couleur rouge sombre, signe de sa maturité lors de la récolte, est synonyme de qualité.
Son registre aromatique : Fruité Boisé
A l’observation, il se reconnaît facilement, car ces baies ont un pédoncule très fin. Le nez de ce poivre exprime, sur un fond fruité, de fortes notes d’herbes brûlées, le tout enrobé par de puissants arômes boisés. En bouche, il est moyennement piquant, presque rafraichissant, avec des saveurs exotiques.
Utilisations salées : Légumes croquants revenus au beurre ou en gratin, girolles sautées, homard grillé, bar rôti ou poisson blanc, volaille…
Utilisations sucrées : Chocolat amer (accord parfait !)
Tableau comparatif des différents poivres
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